CHAPITRE II
LES JOURS LES PLUS LONGS
(JUIN-AOUT 1944)

     

Le 6 juin est une date clé dans l'histoire de la Résistance. C'est une date essentielle dans l'histoire militaire de la guerre. Sur d'autres plans, elle ne constitue pas une césure aussi déterminante. Le constat s'applique notamment à l'opinion publique où la continuité prévaut encore une fois, mettant en évidence, s'il en est besoin, la différence de rythme entre le vécu ordinaire et le vécu engagé.

L'accélération des événements et la dramatisation du climat font seulement ressortir les traits saillants d'une opinion qui n'a plus à se chercher, mais qui attend la délivrance dans la crainte ou l'enthousiasme. La certitude de la Libération prochaine ne fait que rendre encore plus insupportables les contraintes et les brutalités. Elle favorise l'engagement actif de pans plus larges de la population derrière la Résistance. Dans la mesure où l'on ne peut guère vivre autrement qu'au jour le jour, le climat émotionnel ne cesse de s'alourdir. Les dernières semaines sont aussi les plus rudes. Les derniers lambeaux de Vichy se désagrègent, récupérés par le courant dominant ou s'évanouissant dans l'anonymat. La dureté de la répression menée par un occupant et des collaborationnistes se sentant perdus et parfois pleins de hargne exacerbe la haine contre ceux que l'on considère comme des traîtres. Ces ultimes semaines sont aussi celles d'une presque guerre civile. La responsabilité en incombe aux exactions de ceux qui combattent aux côtés des occupants bien plus qu'aux exécutions opérées par une Résistance qui voit les siens massacrés.

 

A - LES DERNIERES SEMAINES D'OCCUPATION

1 - Les nerfs à vif

Finalement, le débarquement de Normandie crée une “ véritable surprise ”1, comme d'habitude pour ces événements vainement attendus depuis si longtemps et malgré la rumeur qui circule avec persistance plus d'une semaine. Mais croit-on aux rumeurs que l'on colporte ?
Le succès de l'opération est rapidement connu, et son issue ne fait pas de doute. La mise en œuvre d'armes nouvelles par les Allemands n'inquiète pas réellement2. Mais les Alliés anglo-saxons déçoivent une fois de plus puisque les troupes débarquées piétinent. Le front de Normandie polarise l'attention et fait quelque peu oublier les autres lieux de batailles, y compris en Italie. On reste persuadé qu'un autre débarquement aura lieu en France et, dans la première quinzaine de juillet, la rumeur le situe en Languedoc (au grand soulagement de ceux qui le craignent en Provence)3.
La population vit sur les nerfs. Les survols entretiennent la hantise des bombardements. Les alertes sont presque quotidiennes. Toulon et La Seyne sont à nouveau visées à trois reprises et de façon très violente, les 5 et 11 juillet et le 6 août. Pour la population (et pour la Résistance), ces opérations se justifient mal, bien qu'elles prennent pour cible l'arsenal, les chantiers navals, les gares et les voies ferrées. Les villes étant désertées, elles n'auraient fait que peu de victimes si, le 11 juillet, la panique n'avait tué 88 Seynois, réfugiés dans le tunnel de l'émissaire commun en cours de creusement et qui servait d'abri4.
Ce climat explique qu'il manque 3 600 ouvriers sur les 9 800 que compte l'arsenal alors5. Depuis le 6 juin, il y règne comme une atmosphère de grève perlée. L'ensemble de l'activité économique fonctionne au ralenti. Tout est motif d'inquiétude : la guerre et les éclaboussures que la région reçoit ou craint de recevoir, les évacuations et les réquisitions pour le travail côtier qui continuent, les rafles, etc. Aux motifs classiques de peur, s'en ajoutent d'autres, plus particuliers. Tandis que les cadres de la Marine redoutent une insurrection ouvrière, les milieux financiers se demandent ce qu'il adviendra de la Bourse en cas de victoire alliée ...6
Vichy n'existe déjà plus. Ce qui s'y passe suscite encore moins d'intérêt que les mois précédents. Les discours du Maréchal ne retiennent pas plus l'attention que les éditoriaux d'Henriot7. Le 30 juin est le seul jour où l'on s'inquiète des chefs discrédités. Ce jour-là, en effet, la radio ne donne aucune information de toute la matinée... et ce mutisme ouvre donc la porte à toutes les habituelles suppositions sur le décès du Maréchal, l'assassinat de Laval ou la nomination de Doriot comme gauleiter8. Certains espèrent encore une entente Pétain-de Gaulle qui écarterait le risque des combats sur le sol national et la peur, non moins obsédante, du “ désordre ” (sous-entendu : du communisme). Sont-ils aussi nombreux que l'écrit le commissaire de police d'Hyères, le 25 juillet ? Ne fait-t-il pas de ses propres soucis ceux de “ l'immense majorité ” ?9
Cette peur des représailles et de l'insécurité, si naturelle, joue toujours un rôle de frein. Malgré l'enthousiasme unanime soulevé par le débarquement de Normandie, elle a limité le soutien de la population aux résistants alors mobilisés10. Il n'est pas sûr que
“ l'immense majorité de la population pour ardemment qu'elle ait souhaitée secouer le joug allemand n'entendait pas le briser par le feu et par l'épée. ”11

Il serait, plus exact, d'écrire qu'elle n'entendait pas subir le feu et manier elle-même l'épée. Elle garde dans son ensemble le souci de “ l'ordre ”. Mais la passivité qu'il engendre est compensée par le déracinement forcé, par la colère d'avoir parfois tout perdu et par les difficultés quotidiennes qui portent l'énervement à son comble.

L'atmosphère de désobéissance n'améliore pas le rendement des réquisitions de main-d’œuvre. Depuis les événements de juin, les défaillances, et, avec elles, les problèmes ont augmenté. La région hyèroise, où la situation était déjà tendue, reste le secteur le plus critique. Le commandement allemand prolonge et accroît les sanctions prises auparavant. Il les étend aux communes de la périphérie est de Toulon, La Garde et La Crau en particulier. À partir du 11 juin, toutes les salles de spectacle, les cafés, les restaurants (sauf ceux qui servent les travailleurs) sont fermés. Le couvre-feu est ramené à 20 heures 30. Mais rien n'y fait. La situation est inextricable. À la mauvaise volonté des uns, s'ajoutent les contradictions qui règnent du côté de l'occupant où chaque unité n'en fait qu'à sa tête12. Une semaine après, les Allemands créent une compagnie disciplinaire pour les requis récalcitrants et décident, pour punir un peu plus la population, de confisquer les postes TSF. Ils n'en récupèrent cependant qu'un millier environ, ce qui n'est pas considérable par rapport aux 18 000 habitants de la localité. Ces mesures ne provoquent pas de changements, pas ceux souhaités en tout cas. Il ne reste plus qu'à remettre sur pied, à la mi-juillet, une nouvelle organisation des exemptions et des tours de réquisitions.
Ailleurs, la situation continue à s'aggraver. Les maires sont le plus souvent incapables de faire respecter le roulement qu'ils ont établi et se trouvent pris entre les Allemands, de plus en plus nerveux, la Résistance et la population. Menacés par les uns, vilipendés par l'autre, ils sont débordés, et parfois embarqués eux-mêmes avec leur personnel municipal à la place des défaillants13. Le préfet propose, à nouveau et sans illusion, une répartition plus juste entre les départements provençaux...
   La situation des transports empire et, avec elle, celle du ravitaillement. Le département reste sur le fil du rasoir tout au long de ces semaines. Il n'y a pratiquement plus de distributions de fromage ou de viande. Les réserves de farine se limitent parfois à deux jours d'approvisionnement. Pourtant, l'inscription obligatoire chez les boulangers, puis la réduction de la ration de pain de 350 à 250 g à Toulon, à la mi-juin, permettent un répit. Grâce à quelques arrivages, la ration normale est même rétablie un moment. Mais la situation se détériore à nouveau dès le début juillet. Les boulangeries doivent fermer quatre jours par semaine. Les Allemands cèdent 75 tonnes de farine pour Toulon et La Seyne, mais la ration tombe quand même à 300 g. Elle est de 250 g ailleurs. Nombre de villages et de petites villes manquent de pain plusieurs jours de suite14.

Cette pénurie offre l'occasion de relancer la campagne pour le pain. Elle entretient opportunément le terreau de l'insurrection nationale. Chacun en est conscient. Le préfet ne cesse d'alerter Vichy sur les conséquences psychologiques désastreuses d'un ravitaillement plus que déficient. L'irréparable est en train de s'accomplir, d'après lui. L'ampleur et la coordination des mouvements syndicaux et populaires autour du 14 juillet lui ont fait toucher du doigt la gravité de la situation. Mais le raisonnement qui consiste à croire qu'un meilleur approvisionnement suffirait alors à rétablir le calme est un peu sommaire. C'est prendre au pied de la lettre les réclamations officiellement formulées.

Base des revendications, la pénurie - réelle et tragique - sert de tremplin à la Résistance, à la Résistance communiste en particulier15. Elle l'utilise et, avec elle, la colère qu'elle engendre pour susciter l'action de masse. C'est à la fois un moyen d'améliorer la condition des gens, un moyen de prise de conscience et, surtout à ce moment-là, un moyen de les inciter à l'action. Un peu plus déterminées, et parfois plus violentes, que les précédentes, les manifestations de juillet 1944 participent du mouvement pré-insurrectionnel. La campagne politique relaie l' “ émotion populaire ” en période de soudure. La modernité de l'élite politique (la Résistance organisée) et l'archaïsme des réactions de la masse se mêlent. En prélude aux journées de la Libération proprement dites, alors que l'orientation patriotique et politique est plus claire que jamais, la participation populaire plus importante tend à donner plus de poids aux réflexes surgis du fond des âges. À la haine des profiteurs et des “ accapareurs ”, s'ajoute la xénophobie qui fait prendre plus volontiers pour cibles les commerçants d'origine italienne.

Le mouvement touche particulièrement les communes de l'intérieur où les réfugiés du littoral, Toulonnais, Seynois, Mentonnais, moins tenus par les liens d'interconnaissance, prennent des attitudes plus radicales que celles des gens du lieu et se retrouvent souvent à l'origine des incidents.  

Trop de souffrances, trop de revanches, trop d'humiliations se sont accumulées. La population, résistante ou non, veut des coupables, et, à défaut, des boucs émissaires. Les autorités, dévaluées par leur complicité au moins objective avec les occupants, sont rejetées. Le pouvoir de Vichy ne se réduit même plus aux apparences. Il ne reste plus que la violence. Celle que crée la dureté des conditions de vie et celle de l'occupant ou de ses complices.  

2 - Du côté des “ collabos ”

Le terme infamant de “ collabo ” englobe toutes les formes d'aide qui est ou que l'on suppose apportée au régime et aux Allemands. Il est généreusement attribué à ceux que leurs fonctions, leur position ou leur origine rendent suspects, ainsi en va-t-il souvent des Alsaciens, d'autant plus facilement assimilés aux “ Boches ” qu'ils sont utilisés comme interprètes. Ceux-ci, même occasionnels, comme les gardes-champêtres trop entreprenants dans le ramassage des requis, ou les fonctionnaires zélés, les patrons autoritaires et peu regardants sur le chiffre d'affaires qu'ils font avec l'occupant, les légionnaires toujours convaincus sont qualifiés de la même façon que les miliciens ou les auxiliaires directs des Allemands. Si tant est qu'elle l'ait été auparavant, la distinction entre vichystes et pronazis - collaborationnistes - n'est plus faite alors et les excès des uns rejaillissent sur les autres, même devenus prudents.

Dans sa volonté suicidaire de “ sauvegarder les intérêts français ”, autrement dit de prendre sous sa responsabilité les exigences allemandes, le régime est largement responsable de cette assimilation. C'est ainsi que l'expédition de représailles du 12 juin à Aups est “ purement française ” ou que les sanctions prises à l'encontre des communes de la région toulonnaise à cause des défaillances aux réquisitions sont couvertes par la sous-préfecture. Devant l'insuffisance des requis dracénois, le SD convoque le chef du cabinet du préfet, le capitaine de gendarmerie et le commissaire de police et leur fait un efficace chantage à la rafle. C'est donc la police française qui l'effectue le 21 juillet et met à son débit les 85 arrestations et les 42 réquisitions qui l'accompagnent. C'en est au point de mécontenter le très vichyste commissaire de la localité16.
Mais le pouvoir a du mal à se faire obéir. Le cas de la gendarmerie est symptomatique. Malgré le rassemblement de ses hommes à Draguignan depuis le 7 juin, son commandant parvient à éviter les missions trop délicates, l'expédition d'Aups par exemple. Les rondes faites dans le Haut-Var se déroulent dans une atmosphère de coexistence avec les maquis locaux. Le 22 juin, le NAP ne signale qu'un seul adversaire sur trente parmi les gendarmes regroupés au chef-lieu17. La Résistance a pris contact avec le commandant et lui a fait admettre l'autorité des FFI18. L'administration est acquise dans son ensemble à la Résistance, bien que trop “ mollement ” aux yeux de certains. Personne ne peut encore mesurer la pénétration de la Résistance en son sein, chaque Résistance ayant travaillé isolément, même si, en ce domaine, la supériorité appartient au MLN (grâce au NAP). Il y aura donc quelques surprises à la Libération, lorsqu'on constatera que tel chef de service catalogué comme “ collabo ” se révèle agent de renseignement d'un réseau.
Les maires vichystes se plaignent du “ sabotage ” de l'administration. Cette vieille antienne approche enfin de la vérité. Dans leur bouche, ce n'est pourtant qu'un lieu commun propre à leur milieu, d'autant qu'ils mettent souvent en accusation une administration qui n'est pas spécialement résistante, celle du Ravitaillement général19. C'est aussi un prétexte, car l'épidémie de démissions touche une vingtaine de communes supplémentaires. La délégation spéciale de Bras avoue ouvertement ce que d'autres n'osent dire : elle est dépassée par une population devenue hostile, et qui, surtout, exprime désormais cette hostilité sans retenue20. Les événements vont si vite que l'on ne peut guère généraliser le recours aux délégués spéciaux extraordinaires. Les secrétaires de mairie, souvent acquis à la Résistance, assurent donc la continuité de l'administration communale.
La Résistance, entendue au sens large, même non structurée, détient déjà une part du pouvoir. Certains maires nommés tentent encore de réagir et protestent. Aux Arcs, les conseillers municipaux et leurs épouses sont pris à partie, les uns aux cafés ou aux boules, les autres dans les queues. Pour le maire, les instigateurs de la fronde sont les “ étrangers ”, entendons tous ceux “ qui-ne-sont-pas-du-village ” : les réfugiés et les repliés, les naturalisés et les immigrés, les cheminots21. Le maire de Sainte-Maxime vitupère contre une affiche signée “ Le Maquis ” dans laquelle la Résistance, en menaçant des voleurs, bafoue son autorité et montre manifestement où se situe le nouveau pouvoir22. En revanche, dans les communes où la municipalité a parti lié avec la Résistance, la situation est remarquablement calme, malgré les réquisitions et la pénurie.
   Le dernier carré de fidèles du Maréchal continue de se bercer de quelques illusions anciennes comme l'entente Pétain/de Gaulle ou le rapprochement avec les États-Unis. Modérés ou “ durs ”, les vichystes nourrissent tous l'espoir d'une coalition antibolchevique23. Il en est pour pronostiquer un changement de régime en Allemagne sur le mode italien. Depuis assez longtemps, une partie des dirigeants de la Légion place ses espérances du côté des Anglo-Saxons et de la Résistance anticommuniste. L'appel à la neutralité en cas de combats qu'elle lance, le 10 juin, n'est pas sans signification. Son chef départemental, Barbero, a établi des contacts avec le MLN, par l'intermédiaire d'Amigas à qui il a fourni des renseignements. Menacé d'arrestation, il est d'ailleurs obligé de quitter Toulon au début août24.
Plus neuve, et plus significative, est l'attitude de certains miliciens qui ne désespèrent pas d'un rapprochement du même genre. Rassemblée à Draguignan à partir du 7 juin, la Milice compte environ 150 hommes, malgré les notables défections que les relances et les menaces n'ont pas réussi à éviter. Force supplétive, elle est utilisée pour la garde des routes et des bâtiments publics et pour le contrôle des identités en ville. Sa participation à l'affaire d'Aups, le 12 juin, est plus modeste que celle de son homologue marseillaise. Elle sort peu de Draguignan, mais suffisamment pour se faire remarquer par des coups de main à Flayosc, Bargemon, Salernes ou au Luc25. Les arrestations qui les accompagnent montrent que deux “ lignes ” co-existent à l'intérieur de la Milice et que ses chefs sont divisés.
Il y a les “ durs ”, ceux pour qui le langage de la répression n'a pas de sens caché et qui, perdus pour perdus, ne connaissent que la solution violente. Ce sont en particulier les hommes du 2e bureau, les “ policiers ”, dont certains sont aussi des agents du SD. Ils profitent des indications du Tatoué, ancien maquisard FTP de la 1e Cie. Après avoir “ donné ” ses compagnons aux Allemands, il participe désormais à la Milice. C'est grâce à lui que les miliciens viennent rafler les résistants du Luc, le 26 juin au soir, suivis de peu par le SD, et qu'ils mettent la main sur les armes stockées dans le cimetière du Cannet-des-Maures. Après le meurtre d'Henriot, ce sont les hommes du 2e bureau qui entendent faire des représailles et qui arrêtent momentanément cinq “ suspects ” dracénois (dont Julien Cazelles du MLN), malgré le chef départemental, Verrion, qui dira n'avoir pas pu les “ tenir ”26. Le départ de l'essentiel de la Franc-garde le 6 (ou 8) juillet pour Clermont-Ferrand – 69 hommes en tout - éloigne une partie des “ durs ” et affaiblit le potentiel milicien27. Le moral de ceux qui restent est assez bas.
Plusieurs chefs sont prêts à passer de l'autre côté. Henri Michel et ses amis font demander à celui de Draguignan de remettre les armes dont il dispose à l'annonce du débarquement. Or il propose de se battre avec la Résistance contre les Allemands... ce qui est, bien entendu, refusé28 . Le chef départemental, qui se veut temporisateur, cherche par tous les moyens le contact avec la Résistance et, pour lui, les arrestations en sont un. C'est pour prendre langue avec la Résistance de Fréjus-Saint-Raphaël qu'il fait relâcher Albert Pierrugues, responsable AS, pris à Flayosc. L'opération tourne court, tout comme celle qui consiste à libérer (avec promesse de retour) le chef du service des émetteurs du sous-réseau Azur (F2) arrêté par la milice, le 28 juin, à la ferme Honnorat, près de Draguignan. L'homme, un ancien sous-officier de marine, est mis au vert par ses camarades du réseau qu'il est allé rejoindre. Il n'est pas question pour eux de dialoguer avec la Milice et les agents du réseau arrêtés en même temps que lui sont sortis de la prison de Draguignan, le 23 juillet, par les hommes du GARV avec l'aide du gardien-chef de la prison, membre de l'AS depuis longtemps (et sur lequel la Milice se vengera)29. Verrion croit enfin tenir le bon contact avec la Résistance quand un agent double lui fait rencontrer, Armand (ou Brutus), un officier CFL à Toulon, le 16 juillet. Ce dernier qu'il doit supposer haut placé dans la hiérarchie est un résistant de longue date, membre de Combat et responsable d'une sorte de groupe franc. Il se dit mandaté par Salvatori, chef départemental CFL.-FFI, pour inciter Verrion à donner l'emplacement des dépôts d'armes de la Milice et à prévenir la Résistance des opérations et des arrestations projetées contre elle par son organisation ou par les Allemands. Sans s'engager sur ces points, Verrion aurait proposé à son interlocuteur une sorte de trêve contre les FTP qu'il assimile à des “ bandits espagnols ” (sic), alors que l'AS est, pour lui, une organisation hiérarchisée et encadrée par des officiers de carrière, une organisation, en somme, avec laquelle il croit possible de s'entendre. Les deux hommes se seraient mis d'accord pour que leurs troupes respectives ne se tirent pas dessus30.

L'affaire est importante. Elle intéresse plus l'histoire de la Milice que celle de la Résistance. De ce côté-ci, les positions sont fermes. Salvatori, bien que mis au courant, dira n'avoir mandaté personne et, dès que le CDL et lui-même apprennent le résultat de cette rencontre, ils ordonnent de rompre le contact. Comme à Draguignan, quel que soit le degré d'anti-communisme que certains membres du MLN peuvent nourrir, aucun accord n'est possible avec les “ collabos ” par excellence. Les tentatives pour enfoncer un coin entre les courants de la Résistance sont ici vouées à l'échec. La solidarité résistante ne se discute pas. Par contre, la tentative du chef départemental de la Milice ne peut pas être considérée comme une initiative isolée. On trouve trace de semblables contacts en d'autres régions. D'ailleurs, Verrion rend compte de son entrevue au chef régional de la Milice, le docteur Durandy, de Marseille. Cette recherche d'un accord avec une partie de la Résistance sur la base d'une alliance anticommuniste s'effectue certainement sur instruction de Darnand et l'on peut la considérer comme son ultime tentative de retournement.

  La tentative est désespérée. Le terme “ Milice ” est depuis trop de mois le terme générique qui désigne tous les acteurs de la collaboration militaire, et notamment les desperados du PPF qui, plus que tous les autres “ collabos ”, participent aux horreurs des dernières semaines de l'Occupation.

Le PPF connaît lui aussi des divisions. Malgré la propagande qu'il distribue encore et qui affirme que “ l'Angleterre sera vaincue ”31, le découragement affecte des rangs très clairsemés et divisés par les agissements de Vedovini et de ses hommes du Comité pour la Justice Sociale. La brutalité de leurs interventions et une orientation de plus en plus exclusivement tournée vers la chasse aux maquisards alimentent la critique. Certains PPF les trouvent encombrants. La Résistance, en l'occurrence le GF de Jacques Bruschini (soutenu par Fortoul) a commencé à leur faire la guerre. Lors de la dissolution du maquis de Siou Blanc, il a surpris quatre de ses hommes qui, à Méounes, se faisait passer pour maquisards. Il a pu en exécuter trois dans les bois des environs, mais le quatrième a réussi fuir. Il y a eu depuis d'autres exécutions ou tentatives d'exécutions à Toulon même. Les “ politiques ” du PPF essaient de se faire oublier ou de préparer leur fuite (le chef départemental, par exemple). Ceux qui travaillent pour l'Office de Placement allemand, l'employeur officiel du groupe Vedovini, poussent à la rupture. Elle est consacrée le 11 juillet. L'OPA garde dix hommes de main pour continuer à rechercher les réfractaires, tandis que Vedovini et ses hommes rejoignent, à Brignoles, l'état-major de la 242e Division pour lequel ils vont travailler comme éléments de la Division Brandebourg. Ils vont sillonner la région, par groupes de deux, en se faisant passer pour maquisard, comme d'habitude, afin de préparer les expéditions punitives de la Wehrmacht. Ces hommes sont les acteurs de l'épisode le plus noir de la collaboration locale. Durant ces quelques jours de juillet-août, ils sont de toutes les tragiques affaires qui endeuillent le Haut-Var. Participant à la répression en uniforme allemand, ils donnent de la consistance au mythe de “ l'Allemand qui parle patois ”. Pour la population et la Résistance, il s'agit évidemment de “ miliciens ”, confusion qui aura sa part dans l'exécution, dans le même temps ou à la Libération, d'une dizaine de collaborateurs de villages, anciens SOL ou miliciens qui n'ont pas eu assez de conviction pour participer au rassemblement de Draguignan, ou “ agents de la Gestapo ” supposés.

3 - L'Occupant aux abois

Les divisions du PPF reflètent aussi celles des Allemands. Le découragement de la Todt (qui plie bagage sans attendre la mi-août), le profil bas de l'OPA contrastent avec la fébrilité ou la pugnacité d'autres administrations occupantes. Les travaux de la base sous-marine de Saint-Mandrier se poursuivent jusqu'au bout avec un certain acharnement. Au durcissement de la répression en zone rurale, s'oppose la relative mansuétude de la Kriegsmarine qui s'en tient (heureusement) aux menaces vis-à-vis des ouvriers absents ou désormais improductifs de Toulon et La Seyne. La Feldkommandantur 800 qui siège à Draguignan essaie de ne pas trop “ se salir les mains ”, heureuse dans le cas d'Aups de laisser faire la répression aux Français. Pour autant qu'on puisse le savoir, elle ne manifeste pas un acharnement particulier. On peut remarquer qu'aucun otage n'est exécuté. Peut-être est-ce une conséquence de la répartition des rôles, mais on est, hélas, plus expéditif, à Brignoles, du côté de la 242e Division32.

Depuis le 17 juin, la région méditerranéenne est devenue “ zone des combats ”. La Wehrmacht a les pleins pouvoirs. Pour se garantir des menaces qui pèsent - et celle des bombardements n'est pas la moindre - les Allemands essaient d'accélérer les travaux de défense côtière, d'où un recours frénétique autant qu'inefficace aux réquisitions. Pour empêcher une éventuelle utilisation des ports par les Alliés, ils font couler des bâtiments dans les passes de Toulon, fin juin, et préparent le minage des quais de Toulon, La Seyne et Saint-Tropez, malgré les protestations du préfet maritime. Sachant qu'il leur sera très difficile de repousser une tentative de débarquement, étant données la nature tourmentée de la côte et le peu de fiabilité de leurs troupes, ils commencent à établir une ligne de défense le long de la RN 7, voie de repli essentielle vers la vallée du Rhône. Il est prévu d'installer des abcès de fixation à l'emplacement des localités les plus importantes, alors que Toulon et Marseille constitueraient des poches retardatrices. Mais il faut pour cela que la sécurité des arrières soit assurée.

La répression militaire prend le pas sur la répression policière (qui ne reste pas inactive)33. À défaut de pouvoir venir à bout des maquis, on essaie de dissuader les hommes de les rejoindre et la population de les aider. Il faut faire peur. De là, les menaces répétées contre ceux que l'on prendra les armes à la main, les rafles massives de la région toulonnaise après la mobilisation de juin, les ratissages répétés du Haut-Var, les prises d'otages et, parfois, leur exécution et la brutalité des réactions.

Relativement épargné par la contre-offensive de juin, le Var compte cependant 63 morts, entre juin et les combats de la Libération (non compris), victimes non accidentelles des occupants, maquisards tués au combat, otages fusillés, habitants exécutés en cours d'expédition. Ne sont inclus dans ce bilan tragique ni les 14 morts de Saint-Martin-de-Bromes, ni les 7 maquisards varois tués à Sainte-Croix-du-Verdon, le 11 août, ni les 9 Marseillais tombés dans la Sainte-Baume, le 10 juin, ni les 38 fusillés de Signes, les 18 juillet (29) et 12 août (9), ce qui aurait fait plus que doubler le chiffre.

L'histoire de la réaction militaire allemande dans cette période doit être considérée d'un point de vue régional, au même titre que les opérations de résistance qu'elle prétend réprimer. À ce niveau, les attaques contre les maquis s'articulent en deux phases principales :

- entre le 10 et le 17 juin, alors que la Résistance, sans grande capacité défensive, est encore mobilisée et que les occupants cherchent à disperser ses rassemblements. Le Var est, comme nous l'avons vu, peu concerné.

- entre le 17 juillet et le début août, pour contrecarrer les initiatives prises autour du 14 juillet et essayer d'éliminer les zones alpines insurgées34. C'est à ce moment-là que sont portés les coups les plus rudes aux FTP du Haut-Var.
Malgré les pertes et les difficultés qu'elles occasionnent, ces attaques ne parviennent pas à leurs fins. Les zones de maquis ne sont pas “ nettoyées ” et l'insécurité continue de régner. La destruction systématique des ponts routiers du Haut-Var par les FTPF du camp Robert, après la mi-juillet, marque symboliquement le territoire - la partie alpine - que les occupants ne contrôlent pas35.
 Le face-à-face avec la Résistance amplifie la peur que les occupants en ont. Ils savent que la population est solidaire avec elle. Ils se sentent menacés. À la peur panique des “ terroristes ”, s'ajoute celle des troupes allogènes dont ils doutent, avec raison, de la fidélité. Des mutations d'unités ont lieu à La Seyne et se préparent sur la côte des Maures à la veille du débarquement du mois d'août. Ils soupçonnent probablement les contacts qu'elles ont établis avec la Résistance locale. Ils imaginent celle-ci plus forte qu'elle n'est en réalité. Ils lui attribuent des effectifs démesurés. Les PPF de retour d'expédition évaluent à 20 000 (!) les maquisards du Haut-Var et répandent le bruit qu'ils bénéficieraient de l'appui de parachutistes canadiens et néo-zélandais. Le maquis CFL Vallier comprendrait à lui seul 3 000 hommes environ36. La surestimation des effectifs résistants n'est ni un fait nouveau, ni une manie locale. Le phénomène est signalé un peu partout. Madeleine Baudoin a fait remarquer, avec raison, que les chiffres du rapport Catilina du SD de Marseille  - 7 000 dans la zone des maquis et 4 000 dans leur zone d'influence - relevaient de la fantaisie37. S'agit-il seulement de masquer l'impuissance à venir à bout du phénomène ? N'est-ce pas plutôt le signe de la démoralisation de soldats qui savent perdue la cause qu'ils défendent et redoutable le monde qui les entoure, l'imaginant plus dangereux qu'il n'est en réalité ?38

L'action de la Résistance n'est pas le seul facteur responsable de la démoralisation. Mais elle y a contribué, sous toutes ses formes. Toutes les actions menées, en particulier depuis le 6 juin, ont convaincu l'occupant de son isolement et de l'hostilité du pays où il se trouve. À la date du 7 août, le journal de marche de l'Armée G estime qu’

“ en cas de dégradation de la situation, on peut s'attendre à un soulèvement populaire qui montrera, non pas un peuple français fatigué, mais des gens d'un tempérament enflammé. ”39

ce faisant il traduit davantage l'image que la Résistance veut donner que la réalité. Mais n'est-ce pas le but recherché que de dominer psychologiquement l'adversaire ? C'est ce que commencent à théoriser les partisans de la guerre de guérilla, sans que ses acteurs en aient toujours pleinement conscience, mais c'est ce à quoi contribue toute la Résistance, même celle qui a une conception plus classique de la lutte.
 

 

1. ADV, 1 W 22, Rens. gén., 11 juin 1944 et autres rapports hebdomadaires de ce mois.

2. ADV, 1 W 22, 25 juin 1944.

3. ADV, 1 W 22, 2 juillet 1944.

4. Les bombardements ont fait 1 victime le 5 juillet, 14 le 11 et 15 le 6 août. Sur le drame de l'émissaire commun, AD Bouches-du-Rhône M6 III 42, Préfet 13 et 14 juillet, rapport Guichard sur la panique de l'émissaire commun, 22 juillet 1944 : il y avait ce jour-là 3 à 5 000 personnes dans la galerie, au lieu des 1 000 ou 1 500 habituels

5 ADV, 1 W 22, rapport de la Sûreté navale, 22 juin 1944.

6. ADV, 1 W 22, Rens. gén., 18 juin 1944.

7. ADV, 1 W 22, par ex. le 11 juin 1944 (les éditoriaux d'Henriot ne sont plus du tout suivis) et le 23 juillet (“ les mots ne servent plus à rien ”, à propos des messages de Laval et Pétain).

8. ADV, 1 W 25, Rens. gén., 1er juillet 1944.

9. ADV, 1 W 13, 25 juillet 1944.

10. ADV, 1 W 22, Rens. gén., 11 juin 1944.

11. R. PAXTON, op. cit., p. 277.

12. ADV, 1 W 80, correspondance du maire, 8 et 16 juillet 1944 ; 1 W 82, dossier avec les principales pièces, entre le 7 juin et le 7 juillet (notamment rapport du sous-préfet, 26 juin, faisant l'historique de l'affaire et rappelant que 2 000 Hyèrois travaillent normalement pour l'occupant) et G. ROUX, op. cit., p. 15.

13. À Cerces, le 4 juillet, à Salernes, le 6, à Hyères. Le maire de Rians veut être déchargé de ses responsabilités parce que, le 4 juillet, aucun requis ne s'est présenté (1 W 48 dossier Varages, correspondance du 6 juillet 1944).

14. ADV, 3 Z 20 2, préfet, 19 juillet 1944 : Le Beausset est resté sans pain quatre jours, entre le 13 et le 17, Six-Fours de même pendant six jours depuis le 14, Saint-Paul-en-Forêt en a manque à partir du 12, etc.

15. ADBdR, M6 III 42, 20 juillet 1944.

16. ADV, Cour de Justice de Toulon 11, dossier De., rapport du commissaire, 21 juillet 1944 où il propose de laisser faire cette besogne aux Allemands.

17. AN, 72 AJ 199-200 documents Roustan, NAP Thoniers à RSH/L, 22 juin 1944 : on compte vingt “ amis mous ”  et huit “ résistants ”. Constat identique par P. LIMAGNE, op. cit., t. 3, p. 2 144, à la date du 14 juillet 1944 : les gendarmes qui ne sont pas allés au maquis ont gardé des relations avec ceux qui s'y trouvent. Tous sont très anti-allemands.

18. H. Michel, tém. cit. d'après lequel cet officier aurait été très habilement “ retourné ”. Hésitant à admettre l'autorité du capitaine Fontès, chef FFI de l'arrondissement, parce que moins gradé que lui, la Résistance le fait “ coiffer ” par un commandant de la Garde républicaine en retraite, nommé intendant de police à titre symbolique...

19. ADV, 1 W 33, Les Arcs, plainte du maire à ce sujet, 20 juillet 1944 et 1 W 44, La Londe, démission du maire qui prend ce prétexte, 16 juillet.

20. ADV 1 W 36, Bras, 27 juillet 1944, lettre de démission du président de la délégation. Ont démissionné en juin, les municipalités de Méounes, Pourrières, Régusse, Rians, Saint-Paul-en-Forêt, Seillons, Tavernes, Aiguines, Flassans ; en juillet, celles de Carnoules, Correns, Châteaudouble, Bras, Sillans, Varages, Salernes, Ramatuelle, La Londe, Fayence, Montfort et, en août, celle des Mayons.

21. ADV, 1 W 33, Les Arcs, lettres du maire, 20 et 31 juillet 1944.

22. J.-M. GUILLON, Le Var..., op. cit., document 158, rapport du maire, 11 juillet. L'affiche en question rejette la responsabilité des vols et promet d'en châtier les auteurs.

23. ADV, 1 W 10, Pol. Draguignan, 25 juillet 1944.

24. ADV, Cour de Justice de Toulon 21, dossier Ba., déposition Amigas. Barbero a été prévenu par Lachal, le directeur national de la Légion, qui le convoque à Vichy, le 1er août, pour le faire partir de Toulon et qui lui montre un rapport de la “ Gestapo ” contre lui.

25. Expéditions à Flayosc 15 et 21 juin (trois arrestations), Le Luc 26-27 juin (sept arrestations avec le SD, venu en concurrent), Salernes 1er juillet (cinq arrestations), Bargemon 14 juillet (deux arrestations, expédition conjointe avec les Allemands et les gendarmes).

26. ADBdR, Cour de justice d'Aix-en-Provence, dossiers 167 et 169

27. Rassemblés avec les miliciens des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et du Gard, ces hommes vont s' “ illustrer ” par leurs exactions tragiques dans la région d'Issoire (Puy-de-Dôme).

28. H. Michel, tém. cit. L'affaire semble se situer avant le 6 juin 1944.

29. Ce gardien, Léon Veyret est arrêté le 29 juillet et emprisonné à Marseille, après sévices. Avec le chef de service de F2, Maurice Marot Rice, sont arrêtés les occupants et le propriétaire de la ferme, ainsi que le garagiste Michel de Salernes.

30. ADBdR, Cour de Justice d'Aix-en-Provence, dossiers 167 et 169. On remarquera que la Milice confond l'ORA et l'AS. Armand est un homme d'une cinquantaine d'années qui appartient à l'URAC (signification du sigle inconnue), l'une des composantes de l'AS de Toulon, qui a participé, on le verra, à l'affaire de Siou-Blanc.

31. Tract du PPF diffusé à Toulon le 17 juin 1944.

32. Cette division qui contrôle l'essentiel du département est dirigée par le général Baessler, qui est sous les ordres du général Neuling, commandant le 62e CA à partir de Draguignan. La FK 800 est sous les ordres du général Bierenger, tandis que l'amiral Ruhfus a la haute main sur le littoral provençal depuis avril.

33. Voir liste des opérations répressives en annexe.

34. J. GARCIN, op. cit., distingue deux phases dans les Basses-Alpes : du 11 au 17 juin et du 17 au 25 juillet (à partir du sud du département). On se rappelle que l'attaque du Vercors commence le 21 juillet. Il y a couplage entre les offensives.

35. J.-M. GUILLON, Le Var..., op. cit., document 155, rapport du préfet, 26 juillet 1944, à ce sujet.

36. ADV, 1 W 25, Rens. gén. 27 juillet 1944.

37. M. BAUDOIN, Histoire..., op. cit., p. 87-88, note 2. Même remarque par J. MAURIN pour le Languedoc (La Libération dans le Midi..., op. cit., p. 24) qui relève le manque de logique de cette surestimation, en regard des pertes, très faibles, enregistrées par les Allemands.

38. Par exemple, SHA, 10 P 92, lettre d'un officier de la 2e Cie du Pi. Btl 242, 19 août 1944, venant de la région de Toulon (annexe X du rapport quotidien du 2e bureau de la 1e Armée française, 21 août 1944 : “ si seulement il n'y avait pas ces damnés terroristes, tout n'irait qu'à moitié aussi mal ”).

39. P. GAUJAC, op. cit., p. 77.